au cinoche

elle y est, au cinoche

La famille Bélier, une famille de lutteurs.

Leur vie ? une lutte.

Elle a l'air de rien, comme ça, la mère, avec ses immenses sourires niais, mais en fait c'est elle le cerveau de la lutte.

Elle n'a jamais pu blairer les entendants. Elle s'est mariée avec un non entendant. Ils ont fait des enfants. Et ça doit pas être facile d'élever des enfants dans notre société quand on a fait le choix de ne pas lire sur les lèvres ni utiliser le langage parlé. Pour ne pas avoir l'air d'un "débile". Monsieur Bélier ne parle pas non plus, pour la même raison, mais lui il lit sur les lèvres. Il a combattu son dégoût ou alors il en avait un moins fort, je ne sais pas.

Ils ont dû en rencontrer, des cons entendants, pour en arriver à ce point de lutte.

Et puis, comme si ça ne suffisait pas, ils ont repris une ferme et ont voulu faire vivre leur famille du fromage et du lait fabriqués par leurs vaches. Cette lutte là aussi ils l'ont réussie. Et c'est pourtant pas rien, même quand on entend très bien. On te prend déjà pour un con quand tu fais paysan, alors imagine si tu souris bêtement.

Quand ils se sont jetés dans la lutte anti-cons au point de faire campagne pour les municipales, c'était un poil trop pour leur fille, et ça a été le détonateur de la mutation, qui de toute façon allait arriver un jour où l'autre, comme chez les entendants, les cons et les moins cons : le départ du nid des enfants devenus grands. L'envol.

Je ne m'enfuis pas, je vole.

De mes propres ailes.

J'ai plané pendant une heure et demie. De plus en plus haut. Main dans la main avec mon petit, pas encore assez grand pour voler.

Pas encore.

Je n'ai rien d'autre à dire que merci. Merci pour ce film de luttes, lutte pour vivre, lutte pour être accepté, lutte pour faire ses propres choix, lutte pour être reconnu, chacun lutte pour ses propres convictions, et ils avancent quand même côte à côte. Famille Bélier ou pas.

Faut dire que, chez les béliers, la lutte, c'est aussi la façon dont on fait l'amour.

Que 2015 soit une année de luttes exactement comme ça.

PS merci aussi pour ce film de symboles vibrants, à l'image de cette main paternelle posée sur la gorge de sa fille, vibrant du chant qu'il lui avait demandé. Dernière mainmise du père sur cette gorge, tournée à présent vers un autre. Main qui étreint, au lieu d'étrangler, main qui reçoit le message 5 sur 5, tellement mieux que pas mal de pères entendants. Miche-miche, même en bélier affreusement barbu, qu'est ce que tu m'émeuh.